Critique de Squirelito
« ...ce quelque chose indescriptible qui met le lecteur en apesanteur... » : critique parue sur le blog "Le domaine de Squirelito"
Comment ne pas s’émouvoir devant cette déclaration posthume bercée de souvenirs, de tendresse, de poésie et de ce quelque chose indescriptible qui met le lecteur en apesanteur, peut-être parce que cette écriture en Volupté semble réunir l’amour pour l’éternité.
C’est l’absence de sa compagne, celle qui donna la vie et se donna la mort, qui force le narrateur à retracer leur court parcours de vie qu’ils ont vécu, en se remémorant « L’Amour existe » de Maurice Pialat. Devant l’écran il revoit son visage, sa peau, son corps, ses mouvements et ce qui les entourait, la banlieue, d’avant et d’après. Cette banlieue transformée où les arbres disparaissent et où la folie de l’investissement remplace la tranquillité des petites vies de chacun.
Amoureux des belles lettres, ce livre est pour vous. Avec une plume couleur sépia, Cyrille Latour nous entraîne sous les passages de vie, de ce qui part, s’en va, disparait, se transforme. Fragrances de nostalgie de celui qui a perdu un être cher et qui constate, en même temps, l’évolution d’une société qui ne croit solide que le béton… C’est une caméra qui se promène de Montreuil à Pantin, en passant par les bords de la Marne et autres lieux de la ceinture parisienne. Mais la caméra ne se contente pas de filmer en transcrivant des mots, elle ajoute une musique. Chaque passage est illustré par un instrument, violoncelle, clarinette, piano, violon… pour une lecture andante que je vous conseille ma non presto, afin de voir jaillir une lumière malgré le sombre, voire parfois le néant, qui enveloppe ce brouillard banlieusard.
« Maintenant, il ne dit plus longtemps. Il dit longuement. Ses souvenirs s’installent. Il voudrait probablement s’enliser, ralentir le cours du temps, mais les images imposent leur cadence ; Longuement est le vernis de la petite enfance – quand chaque jour qui passe retarde un peu la vie d’adulte. Longuement est l’onguent de l’ennui, qui pénètre le corps en profondeur. »
« Bientôt le monde sera devenu trop petit. Paris se rêve en grand, le multiplex plutôt que la salle de cinéma, la zone commerciale plutôt que le marchand de fruits exotiques, la barre d’immeubles plutôt que le pavillon. »
« Peut-être raconter est-il le seul moyen d’accéder au souvenir ? »
« Plaisir, joie, abandon, confiance, douceur : tu n’es pas seulement entrée dans ma vie, tu m’y as fait entrer à ta suite. »